Intéressons-nous aux usages de la blockchain dans les secteurs de la Santé, identité numérique, droits d’auteur, objets connectés, faisons le tour des avantages et inconvénients de cette technologie.
La santé
Le secret médical reste le dernier rempart de la vie privée. Les données de santé sont au cœur de l’économie. Elles représentent à la fois des dépenses et des gains « astronomiques » et revêtent un caractère stratégique.
La multiplication des objets connectés permet d’acquérir les données liées à la santé d’un individu. Le volume de données de santé à l’échelle mondiale pourrait ainsi être multiplié par 50 d’ici 2020. Ces données permettent de déduire l’espérance de vie et ainsi la propension d’un individu à consommer tout au long de sa vie par exemple.
La simplification de la gestion de la santé constitue également un enjeu clé. En France par exemple, chaque année plus de 500 millions d’actes médicaux sont générés, 15 millions de séjours hospitalisés sont enregistrés et 1.2 milliard de feuilles de soins sont émises.
Depuis la blockchain, plusieurs applications sont envisagées :
Les données cliniques
Le traitement des demandes de soins et leur anticipation
Les chaînes d’approvisionnement pharmaceutiques
L’internet de la santé
La création d’identité de santé universelle
La gestion des données génomiques
La traçabilité et suivi des actes…
Plusieurs acteurs, tels IBM ou Philips avec Gem health, se sont lancés dans la réalisation de solutions basées sur la blockchain. Elles visent à créer une infrastructure universelle interopérable destinée à partager les dossiers avec l’ensemble de l’écosystème de santé (professionnelles de santé, laboratoires, assureurs, sécurité sociale…) de manière instantanée.
L’ambition est également de créer des normes mondiales permettant d’analyser les données tout en préservant la vie privée et la sécurité.
Documents, données, informations, résultats, traitements… issus des assurances, laboratoires, médecins, pharmaciens… peuvent être stockés et accessibles à l’ensemble des acteurs compétents en quelques secondes contre des heures ou des jours actuellement.
Le patient peut partager ses données avec la mise en place de règles précises et les contrôler (accès éphémères, suppression…). Les données sont cryptées, horodatées, l’origine et la destination sont enregistrées et dotées d’une empreinte numérique unique. Elles ne peuvent être corrompues.
Des contrats intelligents peuvent être mis en place pour déclencher la prise en charge automatique. Par exemple, dès la prise en charge par les pompiers, les informations sont adressées aux partenaires (hôpital, clinique, sécurité sociale, mutuelle, laboratoire…).
De la même manière, les pompiers peuvent accéder aux informations pour rechercher les antécédents, les traitements médicaux… afin de répondre précisément aux besoins du patient et déclencher des actes automatiquement (réservation de salle d’opérations, mobilisation de personnel…). La disponibilité des données peut jouer un rôle décisif dans les soins d’affections lourdes.
Par ailleurs, l’ensemble des informations collectées sur les maladies peuvent être compilées et mis à la disposition d’autrui sur des sites tels qu’avec dna.bit ou http://www.healthmap.org/, permettant de visualiser en temps réel les épidémies ou maladies et ainsi prendre les mesures les plus appropriées.
L’identité numérique
L’authentification de l’identité est complexe à mettre en place mais demeure stratégique. La blockchain permet d’éviter l’enregistrement de mot de passe. citizenshipLes données sont cryptées et stockées de manière décentralisée dans la blockchain.
Les systèmes d’authentification de la blockchain reposant sur les signatures numériques sur la base de clé privée permettent de déduire que celui qui a accès à la clé privée est bel et bien la bonne personne. Ces solutions permettent de parer les attaques visant dérober les données et les renseignements personnels centralisés sur des serveurs.
Elles génèrent à la fois des économies liées à la gestion de la sécurité, renforcent la confiance, développent de nouveaux services, et permettent aux intéressés de maîtriser et de gérer directement leurs données conformément à la réglementation européenne du 4 mai 2016 (JO Europe).
Le projet world Citizenship vise à créer une identité à vocation universelle. Déposée dans la blockchain, elle est enregistrée et prouve l’identité de la personne.
Ainsi, plusieurs des applications peuvent être déployés dans les domaines suivants :
Identité numérique
Passeport
Autorisation de résidence
Certificat de naissance
Login de connexion à un compte ou des services
Gestion des données personnelles
A titre d’illustration, www.bitnation.co a mis en place en décembre 2015 le service du Gouvernement Estonien « E-résidence ». La solution, reposant sur la blockchain, permet à toute personne du monde entier de se doter d’une identité numérique certifiée pour entreprendre en Estonie sans y résider. Cette identité déclenche l’accès à de nombreux services.
Les entrepreneurs peuvent ainsi ouvrir une entreprise, signer des contrats, obtenir un compte bancaire selon les partenaires, déclarer leurs impôts…
Comment cela est-il possible ? Chaque modification de données est enregistrée dans la blockchain.
La solution permet l’horodatage, l’authenticité et l’intégrité des données. Les utilisateurs peuvent également gérer leurs données et voir qui y a accéder mais aussi retirer les autorisations aux services.
Dans la couche du protocole, il est possible d’ajouter des moteurs de règles qui permettent de créer des contrats intelligents informatisés pour s’exécuter automatiquement. Par exemple, dès que le créateur d’entreprise commence, les cotisations sont calculées. Dès qu’il n’a plus d’activité, les cotisations cessent.
L’Estonie, petit pays devient ainsi particulièrement attractif pour les entrepreneurs du monde entier désireux de s’implanter en Europe en raison de ses simplifications administratives (18 minutes pour créer son entreprise en ligne !) et de l’anéantissement des frontières physiques.
Droits d’auteur et droits de la propriété intermédiaire
Chaque année, 40 milliards de morceaux de musique sont téléchargés illégalement. 9 milliard d’images sont partagées par jour, 300 heures de vidéo sont téléchargées chaque minute sur YouTube…
Quant aux produits contrefaits, ils représentent un marché 500 milliards de dollars. En Europe, seulement 4,7 milliards d’euros par an sont générés par les secteurs ou les droits de propriété, selon la Commission européenne.
Plusieurs applications depuis la blockchain sont possibles :
Preuve d’antériorité
Dépôts de brevets, marques, œuvres…
Traçabilité des utilisations et approvisionnement
gestion des droits
Marquage et authenticité
Lutte contre la fraude…
La blockchain peut freiner cette tendance et permettre l’enregistrement de la propriété intellectuelle aisément. Les brevets, produits authentiques, composants électroniques, médicaments, œuvres audiovisuelles, écrits….
Tout actif immatériel ou matériel peut être gravé dans la blockchain. Une fois déposés, l’œuvre ou le produit peut être « tagger » avec un QR code par exemple.
Le scan permet de vérifier l’authenticité. Le propriétaire est le seul à détenir la clé privée. Dès lors, il suffit de remettre cette clé pour transférer le droit de propriété. La transaction peut être réalisée en quelques instants contre plusieurs jours actuellement. Les contrats intelligents permettent automatiquement de fournir le brevet, titre de propriété… au moment où l’argent est bien sur le compte.
Des services reposant sur la blockchain comme www.ascribe.io permettent d’inscrire l’œuvre intellectuelle numérisée et de gérer la licence. Il procure une visibilité de son usage par la mention de son utilisation en ligne. Le propriétaire peut assurer le suivi sur les sites sur lesquels son œuvre est utilisée. A chaque nouvelle utilisation, une notification est adressée à son propriétaire. L’historique de l’enregistrement, les prêts et transferts sont mentionnés.
Le propriétaire peut gérer les droits. http://ujomusic.com propose un système similaire pour les œuvres musicales.
Diffuser ses œuvres vidéo, films, cours… sans aucun intermédiaire, en streaming et être rémunéré à l’audience, c’est ce que propose https://streamium.io .
L’application génère une clé privée et affiche une adresse à l’écran pour que l’utilisateur paie à la demande et puisse visionner. Des services comme www.proofofexistence.com , www.blockverify.io , www.everledger.io , www.skuchain.com , s’orientent davantage sur la traçabilité et le dépôt des actifs, la transparence des chaînes d’approvisionnement et des produits.
Ces solutions assurent une meilleure information, et garantissent l’authenticité des produits pour lutter contre les fraudes tout en renforçant la marque et mécaniquement les ventes.
Les objets connectés
Le nombre d’objets connectés est de 10 milliards aujourd’hui. En 2020, il devrait atteindre 25 milliards. L’augmentation des programmes d’application va accélérer la connexion entre les appareils. L’impression 3D, les objets intelligents…. Vont permettre de développer des produits et de nouveaux services adaptés, personnalisés et à faible coût.
L’Internet des Objets pourrait, en 2020, générer près de 1000 milliards d’euros de croissance globale, dont 344 milliards de revenus additionnels, 177 milliards liés à l’augmentation du pouvoir d’achat, 1,9 milliards liés aux gains de productivité et 3.5 de revenus distribués.
Les applications sont nombreuses depuis la blockchain :
Suivi du fonctionnement et interactions
Surveillance – sécurité
Interventions prédictives
Gestion des droits
Informations/ventes/interventions en temps réel
Optimisation et utilisation des ressources du réseau…
Reste que le principal frein à l’internet des objets demeure la sécurité. Avec des milliards d’objets connectés, il est difficile d’être serein. La blockchain est l’une des solutions. Elle permet de vérifier et de conserver les informations.
La sécurité est basée sur le consensus de la transaction réalisée par le travail de vérification des « mineurs ». Il est possible de définir une hauteur de pourcentage de consensus pour apprécier un fonctionnement bon ou mauvais. Il est ainsi possible de détecter et d’exclure des agents malveillants.
Avec les contrats intelligents, il est alors faisable de coordonner automatiquement les appareils connectés les uns avec les autres pour un coût dérisoire.
Par exemple, IBM et Samsung ont développé en septembre 2014 une plate-forme depuis la blockchain et baptisée Adept (Autonomous Decentralized Peer-to-Peer Telemetry). Testée sur une machine à laver, la solution détecte les informations clés.
Le dispositif permet ainsi de repérer une défaillance imminente de pièce et peut alors de manière autonome sans aucune intervention, commander une pièce de rechange.
Une notification par messagerie indique au propriétaire à quel moment il est possible de remplacer la pièce et d’intervenir. Autre exemple, ce type de solutions peut informer sur la capacité, l’utilisation et la disponibilité en temps réel de salles de conférence, chambres d’hôtels, entrepôts, restaurants ou voitures. www.slock.it s’est spécialisé sur ces sujets de réservation par exemple.
Tout actif réel ou virtuel peut être contrôlé immédiatement offrant ainsi des perspectives nouvelles dans l’économie numérique. L’offre et la demande peuvent se rencontrer en temps réel.
Par ailleurs, sans aucune intervention humaine ou de tiers, la blockchain permet de transférer la propriété des fabricants d’objet ou produits vers le détenteur.
Et ainsi de remettre entre leur main leur vie privée en anéantissant le système centralisé contrôlé et en ouvrant de nouveaux débouchés. A titre d’illustration www. http://www.tilepay.org permet aux individus de gérer ses données et de les monétiser.
Enfin, ce pouvoir d’autonomie (calcul de ses capacités et ressources tels électricité, bande passante…) et de coordination avec d’autres appareils procure la possibilité d’utiliser les ressources dispersées non consommées dans les milliards d’appareil du réseau.
En résumé ?
Avantages | Inconvénients |
Décentralisé | Problème de gouvernance – Non régulé |
Sécurisé | Pas de garanti en cas de perte de sa clé privée |
Ouvert et public | Le stockage est illimité mais qui purgera les données ? |
Contrat intelligent | Capacités d’informations limitées |
Registre d’enregistrement et système universel | Modèle de données insuffisant |
Management de systèmes | Vitesse des transactions pour l’instant faible |
Exploitation des données | Risque de cybersquattage (nom de domaine, marque…) et pas de protection juridique |
Outil de capitalisation pour des recherches | L’évolution du protocole doit être adoptée par une majorité de mineurs |
Peu coûteux (pas de maintenance, stockage…) | |
Flexible | |
Utilise la puissance de calcul et peut la distribuer | |
Contrôle et gestion des données | |
Collaboratif | |
Diminution drastique des coûts | |
Accessibilité/interopérabilité |