Les banques européennes, et notamment françaises, sont présentes dans près de 90 pays. Depuis la crise, les établissements ont repensé leur présence et implantations à l’étranger. Au final, pour renforcer leurs fonds propres, les banques ont réduit certaines activités et en ont déployé de nouvelles. Parallèlement à cette, tendance, de nouveaux acteurs, jusqu’alors moins présents sur certaines zones géographiques, prennent leur place ou interviennent de manière transfrontalière par le bais d’internet. Le point. Extrait de l’article « banque et internationalisation. Quel échiquier ? » du mois mai 2016 paru dans Point Banque 111 . REPRODUCTION INTERDITE. PUBLIE AVEC L’AUTORISATION DE POINT BANQUE.
Dans ce premier épisode nous verrons les enjeux des relations internationales et les facteurs de mutations.
« La contraction à l’international a été particulièrement notable pour certaines banques européennes. Ainsi, les établissements allemands, belges, français, italiens et néerlandais ont réduit leurs positions étrangères cumulées de plus de $6 000 milliards de dollars (43 %) entre début 2008 et fin 2011… Cependant, les banques n’ont pas toutes réduit leurs activités étrangères. Les groupes australiens, espagnols, japonais et suédois se sont substitués partiellement à leurs homologues européens susmentionnés», observait la BRI dans son rapport annuel 2012.
Ces chiffres démontrent l’importance de l’enjeu pour les établissements financiers mais également pour les Etats. En effet, les cinq premières banques françaises que sont BNP Paribas, le groupe BPCE, le groupe Crédit Agricole, Crédit Mutuel et Société Générale, représentent à elles seules plus de 85 % du total de bilan du secteur bancaire français et pèsent un bilan total équivalent à 280 % du Produit Intérieur Brut (PIB) français.
Par ce poids financier, de leurs capacités à être présentes sur des territoires stratégiques et à financer ou pas des Etats, secteurs, activités, matières premières, dépend en partie la puissance de la France.
Un enjeu pour les relations internationales
Par cette situation financière et particulière des banques, la France est en capacité de conduire plus aisément des relations internationales pour agir sur des considérations relatives à sa prospérité économique, à la paix ou à la défense.
Il est important de rappeler que la présence des banques à l’international sert trois utilisations tactiques pour les Etats : la fourniture de moyens pour le déroulement d’actions de développement économique et social et en faveur de la paix, l’irrigation d’opérations liées à la défense ou à l’organisation l’assèchement d’activités allant à l’encontre d’intérêts français et, enfin, des aspects liés à l’exercice du pouvoir politique.
Les facteurs de mutations
Plusieurs facteurs expliquent l’évolution des repositionnements à l’étranger. La déréglementation des activités bancaires et l’accélération de la mise en place, notamment, des marchés européen, africain, asiatique et d’Amérique du Sud pour développer les activités transfrontalières, ont permis de faciliter les implantations hors des territoires nationaux.
En outre, avec un marché européen jugé saturé en particulier en Europe de l’ouest, les banques européennes privilégient la conquête des marchés émergents.
Les populations européennes vieillissantes sont équipées en produits bancaires, inondées de nouvelles offres et également très informées. Les clients européens bénéficient d’une réglementation protectrice. Les rendements de produits d’épargne, par exemple, ne sont plus suffisamment intéressants pour leurs détenteurs et sont au final assez coûteux pour les banques.
Alors que la région asiatique est en forte croissance économique et est dotée d’une population plus jeune, en expansion démographique et représentant plus de 4 milliards de personnes, dont la moitié ne sont pas bancarisées. La zone regorge d’opportunités pour un moindre coût de conquête, bien que les plus fortunés restent très difficiles à capter.
Les banques sont aussi amenées à suivre leurs clients de plus en plus mobiles et mondialisés. En les accompagnant, elles visent à la fois à conquérir de nouveaux clients étrangers et à amortir leurs coûts de « déplacement et d’installation».
Ensuite, le développement de l’approche par les risques reste privilégié. Les banques préfèrent diversifier leur présence sur les marchés plutôt que de se concentrer sur des marchés européens fortement concurrencés. En élargissant leurs zones, les établissements financiers se valorisent également.
L’installation de filiales à l’étranger permet par ailleurs aux établissements de bénéficier de la réglementation et de la fiscalité du territoire d’implantation. Ils peuvent développer des lignes de métiers tels que l’investissement pour Société Générale ou BNP Paribas en Asie. « Le développement international des banques s’explique par la nécessité pour les établissements bancaires de diversifier leur activité afin de bénéficier de marchés plus vastes, qui ne connaissent pas les mêmes cycles de croissance et de crise », constate un rapport de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) intitulé « Activité internationale des grands groupes bancaires français depuis 2006 » publié en octobre 2014.
Les coûts de développement des activités sont également moindres. « Celles qui choisissent en outre de s’implanter localement le font notamment pour réduire les coûts supplémentaires liés à la réalisation d’opérations non résidentes à distance. En effet, la signature d’une opération non résidente s’accompagne de frais opérationnels de nature variée (frais de déplacement, consultations légales) dont le poids diminue s’il est mutualisé sur un portefeuille d’opérations en cas d’implantation locale ».
Enfin, elles s’implantent également en fonction de l’attractivité du territoire, du régime politique, de la main-d’œuvre qualifiée disponible, des conditions de travail.
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Patrice REMEUR