Google peut-il tout prédire ? Les Banques Centrales et les Gouvernements peuvent-ils s’appuyer sur le moteur de recherches Google pour anticiper précisément le taux chômage, l’inflation ou la chute des crédits ou encore la trésorerie des PME ? Peuvent-ils ajuster rapidement leur politique avec ces données en temps réel ?
La réponse est oui. La sérieuse Banque d’Italie vient de publier les travaux de deux chercheurs Italiens, Francesco d’Amuri, économiste et représentant suppléant de la Banque d’Italie au Comité de politique économique ECOFIN et Juri Marcucci démographe Italien, de l’Université de Bocconi.
Intitulé, « le pouvoir prédictif des recherches Google sur les prévisions du taux de chômage », le document approfondi et élargi à d’autres champs les travaux déjà existants, comme ceux de Benjamin Edelmann relatifs à la prévision du taux de natalité ou ceux de Jérémy Ginsberg travaillant sur les propagations de pandémies à partir du célèbre moteur de recherche. Les recherches de Hyunyoung Choi et Hal Varian qui ont utilisé les données de Google ont montré la capacité d’anticiper avec précision les ventes au détail, les achats de maisons et voyages aux États-Unis ou encore les travaux de Main et Juge, ont permis de prédire les entrées dans les cinémas à partir des données mensuelles collectées par Google.
Ainsi, les deux chercheurs italiens concluent leurs travaux, portant sur les US, que les prédictions basées sur Google sont supérieures à celles établies par le gouvernement américain !
Comment ont-ils obtenu ces constats ?
A partir des mots clés « Jobs » et « Collect unemployment », les universitaires ont comparé les méthodes et résultats obtenus dans « les tendances de recherches Google » face à plus de 500 modèles de prévisions et les données des prévisions trimestrielles publiées par la Federal Reserve Bank of Philadelphia.
Ils ont introduit également un test de falsification pour infirmer ou confirmer la pertinence de l’outil. Ce test a démontré la finesse et solidité des algorithmes de recherche de Google.
Au final, les travaux montrent que les résultats de prévisions délivrés sont particulièrement pertinents. Une autre étude publiée au mois de mai 2012, par la Banque centrale de Turquie allait déjà dans ce sens. Les chercheurs Turques Meltem Gülenay Chadwick et Gonul Sengul affirmaient également la performance du moteur de recherche pour réaliser des « prévisions immédiates ».
Quelles sont alors les conséquences de telles recherches ?
Progressivement, plusieurs Banques centrales (Italie, Royaume-Uni, Espagne, Chili) et la FED ont lancé des travaux de réflexions sur l’intégration de ces nouveaux indicateurs basés sur Google. L’ambition est de tenter d’assurer un pilotage plus rapide et de ne plus uniquement se baser sur les indicateurs traditionnels qui, souvent, mettent plusieurs mois à être consolidés et à arriver auprès des décideurs…
La Banque Centrale d’Israël utilise déjà l’outil. Décliner ces indicateurs dans tous les secteurs offrent des possibilités immenses. Ils peuvent mesurer l’intention d’achats ou de ventes de voitures, d’appartements ou encore des services et donc mesurer précisément les besoins en crédits, les risques de santé donc les tarifs, ou pourquoi pas prédire les lieux dans lesquels peuvent se dérouler les crimes ou délits…. En Espagne, le groupe financier BBVA a lancé un partenariat avec Google pour utiliser ces outils à grande échelle et le marché ne fait que commencer.
Cependant, si l’outil est séduisant reste des interrogations sur la fiabilité des données. Le chercheur Benjamin Edelmann, de l’Université d’Harvard, contestait récemment l’impartialité de Google dans la construction des résultats.
Par ailleurs, la question de la légitimité et celle de l’indépendance des données sont également évoquées. Que se passera t-il si le géant décide de ne plus publier de données ou priver certains Etats ou acteurs de ses services ?
Enfin, ne risque t-on pas grâce à la facilité des outils Google, de comprendre, voir, d’anticiper et penser le monde comme Google ?
Rédigé par : Patrice REMEUR